Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Chronique

La Chine après le COVID 19. Quelle place pour nos industriels de la santé ? (2e partie.)

La santé et les médicaments, probables objectifs du 14e plan.

Tout indique que la crise épidémique mettra en branle toutes les capacités technologiques et de recherche de la Chine dans le domaine de la santé.

De la même façon que le numérique et la production industrielle d’équipements informatiques avaient été au cœur des ambitions technologiques du 13e plan, il faut s’attendre à ce que la santé et le médicament figurent en bonne place dans les objectifs du 14e (2021-2025) est en cours d’élaboration.

D’une part, parce que cette orientation est en ligne avec le changement de modèle de croissance promu par les autorités depuis 2012 et, d’autre part, parce que la crise sanitaire a sans doute écorné la crédibilité du Parti auprès de la population sur ce sujet (lire à ce sujet : Le Journal de Fang Fang. Documentaire et brûlot politique).

*

Il reste que, pour l’instant, occupé à mettre de l’ordre dans son système, Pékin, toujours très dépendant des médicaments importés, cède à sa tendance de contrôle central qui ne favorise pas la nouveauté.

La nouvelle procédure d’achats groupés (VBP) [9] lancée à l’été 2018 change en effet la physionomie d’une grosse partie du marché du médicament (40%), pour les acteurs domestiques comme pour les grands groupes pharmaceutiques internationaux.

Les objectifs sont clairs : tirer les prix vers le bas et rationaliser le secteur. Notamment la jungle des grands fabricants de génériques chinois qui tiraient des marges élevées tout en évoluant dans un système sans contrôle centralisé de la qualité.

Dans ce contexte d’assainissement, même les plus petits acteurs chinois seront conduits à des regroupements du moment qu’ils disposent de capacités de R&D.

Quant aux groupes pharmaceutique internationaux tirant 80% de leur chiffre d’affaires de la vente de médicaments à plus haute valeur ajoutée et plus chers, ils risquent à terme après une première période faste, d’être écartés ou contraints de s’allier avec des fabricants chinois pour espérer capter un fragment de marché.

Déjà, l’expérience pilote, appelé « 4+7 », organise un système centralisé d’appels d’offres dont le but est de réduire drastiquement le prix des médicaments génériques et de favoriser le création de pôles de production de génériques dans 4 municipalités (Pékin, Tianjin, Shanghai, Chongqing) et et 7 capitales provinciales (Shenyang, Dalian, Xi’an, Chengdu, Xiamen, Caton, Shenzhen).

Le projet fait des émules. Il incite la plupart des villes et provinces n’ayant pas lancé d’appels d’offres à se rapprocher des entreprises lauréates, créant du même coup une cartellisation du marché.

A ce jour, on sait que le Britannique AstraZeneca (pour son inhibiteur Iressa) et l’Américain Bristol Myers Squibb - BMS - (pour Monopril) ont réussi à se mettre sur les rangs en remportant des appels.

Au total, cette nouvelle politique chinoise d’achat groupé incite peu à l’innovation.

Pour la Chine, la politique introduit également deux autres conséquences néfastes. 1) Une vulnérabilité accrue du pays à des ruptures d’approvisionnement en cas de défaillance, notamment qualitative, et 2) Une focalisation des groupes étrangers sur les marchés qui restent ouverts ou qui concernent des pathologies moins répandues (ex. maladies rares…) ou qui ne sont pas exploités par les fabricants nationaux chinois.

Au total, l’état du marché chinois du médicament et les politiques actuellement à l’œuvre ne sont pas de nature à accroître les IDE pharmaceutiques en Chine.

L’épidémie de COVID en Chine : business as usual ?

Clairement, la crise épidémique COVID 19 aggrave un contexte intérieur économique et politique passablement dégradé pour les intérêts industriels occidentaux.

Si les connaisseurs de la Chine prétendent qu’il en a toujours été ainsi, les industriels européens sont eux unanimes à dénoncer l’extraordinaire difficulté des affaires au cours des derniers mois.

En témoigne le rapport de 400 pages de la Chambre de commerce européenne (1 700 entreprises) du 10 septembre 2020, présenté à la presse mondiale et dont les conclusions sont en contradiction flagrante avec le discours officiel chinois d’ouverture. Sa publication suscita un mélange d’embarras et d’irritations au sein de la Direction politique.

Le président de la Chambre, l’Allemand M. Jörg Wuttke, représentant BASF en Chine, a ainsi déclaré « qu’à la suite de l’épidémie, de nouveaux obstacles sont apparus. Ils ont laissé les Européens se sentir de moins en moins bienvenus en Chine » [10].

Se donner la peine de parcourir le rapport est très instructif sur la manière dont la Chine accueille les investissements étrangers et organise les distorsions de marché, le tout dans un environnement réglementaire qui change sans arrêt.

En fait, les conclusions du rapport sont dans la ligne des précédents et concordent parfaitement avec d’autres sources, notamment le rapport de la DG « Trade » (UE) publié en 2017 sur les méthodes sectorielles utilisées par la Chine pour tenir à distance la concurrence européenne [11].

Note(s) :

[9« Volume Based Procurement », encore appelé « 4+7 ».

[10Les Échos du 10/9/2020 : « Les entreprises européennes en Chine sur un champ de mines politique »

[11SWD(2017) 483 final/2 : “Commission Staff Working Document on Significant Distorsions in the Economy of People’s Republic of China for the Purposes of Trade Defence Investigations” (20 déc. 2017).


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

Commission mixte scientifique 2024 : et après ?

Chine - France : Commission mixte scientifique 2024, vers une partie de poker menteur ?

A Hong-Kong, « Un pays deux systèmes » aux « caractéristiques chinoises. »

Chine-Allemagne : une coopération scientifique revue et encadrée

Pasteur Shanghai. Comment notre gloire nationale a été poussée vers la sortie