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›› Editorial

« Lianghui » 2021 : Quand Li Keqiang est au chevet socio-politique du pays, Wang Yi s’exerce à l’apaisement international

La réunion annuelle des deux assemblées a eu lieu du 4 au 11 mars. Réduite à seulement une semaine pour cause de pandémie, elle s’est achevée avec la conférence de presse de Li Keqiang sur un mode également aménagé.

Comme en mai dernier, la presse masquée était reléguée dans une autre salle, la relation avec le Premier ministre accompagné de deux assesseurs installés à bonne distance, étant réalisée par le truchement d’écrans géants.
Comme chaque année, les réunions rassemblant près de 5000 délégués et conseillers du parti ne furent pas les lieux de débats démocratiques, mais les mises en scène de l’efficacité politique de l’appareil à la tête de la Chine.

Elles appellent à la barre les ténors de la machine politique qui présentent successivement le bilan de l’année écoulée et projettent la vision d’avenir pour le pays. Mais l’essentiel des décisions et des feuilles de route sont arrêtées en amont, par le cœur du système que sont les « plenum » du Comité Central.

Cette fois, l’agenda comportait l’annonce et la mise aux voix du 14e plan quinquennal (2021 – 2025) et celles de la vision « Chine 2035 », projection à 15 ans – ce qui n’était pas arrivé depuis 1996 -, comme toujours adopté à plus de 95% des votants.

Des deux interventions de Li Keqiang, celle de la présentation du travail du parti à l’ouverture de la session de l’ANP et celle de sa conférence de presse on retiendra la persistance d’une « prudence » sociale, financière et politique marquée d’abord par la modestie des objectifs de croissance fixés « au-dessus de 6% », quand la plupart des analystes, se basant sur l’information d’une puissante reprise, attendaient 8% ou plus.

Le choix de la rigueur contre la relance.

La décision d’annoncer un chiffre de croissance pour 2021, alors qu’en mai dernier, sortant de la pandémie, on y avait renoncé, est l’aboutissement d’un débat interne entre ceux qui voulaient définitivement abandonner la longue tradition des objectifs chiffrés, jugés démodés, héritiers d’un système de planification archaïque, et ceux qui considèrent qu’ils sont une motivation de l’appareil et une source d’élan productif.

A l’analyse des débats et des informations distillées on note que les deux idées ont été adoptées. Si l’appareil a maintenu un objectif de croissance pour cette année, en revanche le plan quinquennal et la « vision à 2035 » n’en comportent pas. Plus généralement en matière budgétaire et financière c’est la retenue qui prévaut.

Elle signale la prévalence au parti des tenants de la rigueur que sont Liu He, n°10 du bureau politique, première figure économique du régime et Guo Shuqing, le patron de la Commission de régulation bancaire.
Leur prudence vise aussi à réduire le déficit budgétaire de + de 3,6 à 3,2% et à éviter l’explosion de la dette – en très grande majorité interne – mais déjà égale à plus ou moins 300% du PIB [1].

Après la crise épidémique, la relance budgétaire - « une fantaisie dangereuse » selon Liu He - a également été contrainte à seulement 40% de ce qu’elle avait été en 2008 et en 2012 (aux environs de 300 Mds de $, selon Li Keqiang), alors qu’aux États-Unis elle a atteint – tous plans de relance confondus depuis D. Trump – la somme astronomique de 5000 Mds de $ dont le dernier déclenché par Joe Biden est de 1900 Mds de $.

Dans le même temps, les autorisations d’emprunts publics lancés par les provinces, outils de financement des projets d’infrastructures, ont également été réduites. « Nous ne voulons pas noyer l’économie dans un flot de liquidités » a dit Li Keqiang.

Commentant cette rigueur, qui n’a cependant pas empêché le plus fort accroissement du budget militaire depuis 2 ans (+6,8%, porté à 208 Mds de $) [2], Li Keqiang, évoqué une « consolidation » pour conférer au pays la stabilité nécessaire à la poursuite des réformes, à l’innovation et à la hausse de la qualité générale du développement du pays.

Note(s) :

[1Les chiffres de la dette chinoise sont en réalité mal connus. Selon l’Institut International des Finances (IIF), elle était à 335% du PIB en 2020. En juillet 2019, un article des Echos la situait à 40 000 Mds de $ à 303% du PIB, soit 15% de la dette mondiale.

Mais en 2018, Goldman Sach la voyait déjà à 317% du PIB, dont plus des 2/3 sont celles des entreprises d’État ou privées, globalement 2 fois les dettes des entreprises des pays développées. Quant à la dette extérieure, elle est, toujours selon le l’IIF, estimée à 2290 Mds de $. En hausse régulière, elle ne compte cependant que pour moins de 6% de la dette totale. Pour mémoire, au premier trimestre 2020, 53% de l’encours global de la dette de l’État français était détenu par des acteurs étrangers.

[2Révélée le 4 mars, la hausse du budget militaire pour 2021 est très en-dessus de la hausse du budget général de l’Etat, officiellement affichée à +1,8%


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