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Chine Etats-Unis. Perspectives croisées

Il reste qu’à bien des égards ce souffle nouveau qui propulse la Chine sur le devant de la scène est moins l’expression de réalités tangibles que la manifestation des rêves d’influence planétaire et de puissance, également entretenus par ceux des laudateurs qui extrapolent sans nuance la croissance chinoise : « Dans 20 ans...dans 50 ans : la Chine... ». Qui sait ? Mais aujourdhui la réalité est autre et les dirigeants chinois qui aiment toujours à répéter que la Chine est le plus grand des pays en voie de développement, le savent bien. Ils connaisent leurs fragilités internes générées par d’innombrables dissonnances et vices cachés ; Ils savent aussi que leur nouvelle renommée mondiale ne va pas sans faiblesses, même si ces dernières sont occultées par les relais d’information comme « China Radio International » -qui vient d’ouvrir une station au Laos- et dont les émissions sont écoutées dans le monde entier.

En Asie du Nord-Est d’abord, l’alliance entre Tokyo et Washington n’est pas prête de se dissoudre, tandis que la solution du problème nord-coréen dépend avant tout des cacapités de compromis de Washington et de Pyongyang, au sein d’un dialogue bilatéral ; En Asie du Sud Pékin fait face à la redoutable concurrence américaine, dans un contexte où la Maison Blanche se rapproche de New Delhi et où l’actuel pouvoir à Islamabad perdrait beaucoup si ses liens avec les Etats-Unis s’affaiblissaient. Une bonne partie des pays de l’ASEAN restent encore très attachés à leurs alliances avec Washington, tandis que le regard qu’ils portent vers la Chine est ambigü : locomotive économique de l’Asie, elle reste inflexible sur les différends territoriaux en Mer de Chine du Sud, menace régulièrement de déclencher un conflit dans le Détroit de Taiwan, détourne à son profit les investissements étrangers et défend ses intérêts directs, parfois sans concession pour les nationaux, noyés par des réseaux de Chinois d’outre-mer, aux manières impudentes.

En Afrique, où Pékin convoite aussi les souces d’énergie et de matières premières, l’élan chinois, qui affiche tant de générosité (aides médicales multiples, annulation de la dette des plus pauvres) est parfois terni par l’âpreté au gain des entreprises chinoises, peu respecteuses du droit du travail local. Au point qu’à la fin octobre un « vade-mecum des investissements chinois à l’étranger en 9 points », édité par le Conseil des Affaires d’Etat, était assorti d’un véritable « guide des bonnes manières ». Au Moyen-Orient, où ce sont Washington et Téhéran qui tiennent les cartes majeures, Pékin, dont l’influence stratégique est réduite, doit calibrer son attitude entre d’une part ses appétits pétroliers, sa connivence avec Téhéran, et d’autre part ses relations avec l’UE et les Etats-Unis, ses deux plus grands et indispensables partenaires commerciaux.

Quant à la philosophie des relations internationales fondées sur le principe de non-ingérence, elle gomme les tensions et suppose que la paix résulte de l’harmonie des relations entre les Etats quels qu’ils soient. Ces derniers, tous respectueux les uns des autres, rigoureusement égaux quoi qu’ils fassent, seraient placés sur une trajectoire de progrès et de développement par la grâce de la croissance économique et l’explosion des affaires. Utopie d’un environnement pacifique et florissant généré par le « doux commerce » et la coopération internationale dans une planète en plein tumulte. C’est cette organisation du monde, virtuelle, assez statique, qui renvoie à celle de la SDN, que la Chine appelle sans cesse de ses voeux comme l’environnement idéal de sa montée en puissance qui s’accommode mal de turbulences et du regard trop curieux des autres. Depuis la guerre civile, Washington place en revanche l’exigence de liberté des peuples et, si nécessaire, l’ingérence, au centre de ses stratégies, comme indispensable prélude à la paix.

Enfin, quand on extrapole la puissance montante de la Chine, comparée aux actuelles fragilités américaines, générées par plusieurs méprises stratégiques, on devrait se souvenir qu’à Pékin, le pouvoir politique, protégé par l’opacité du système, peine à se remettre en question, tandis que les Etats-Unis viennent, quoi qu’on en dise et quelles que soient les lacunes bien connues de la démocratie, de procéder à un extraordinaire exercice de transparence planétaire, qui témoigne de la vitalité de son système politique et de l’étendue des libertés de parole qui fondent à la fois leur influence et leur pouvoir d’attraction.


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