Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Editorial

Féroces offensives américaines contre la Chine. Régression politique de l’appareil. L’Occident en quête de son humanisme perdu

Attaques, ripostes, effets indésirables.

En théorie, TikTok et WeChat seront, dans un délai de 45 jours, à compter du 6 août, mis au ban de la société américaine par des sanctions infligées à ceux qui noueraient des transactions avec eux. Qu’il s’agisse d’acteurs américains privés ou officiels, ou d’organisations y compris internationales.

La décision d’élever un « mur » de protection contre ce que la Maison Blanche perçoit comme la menace des technologies numériques chinoises, accentue les fractures déjà installées par la Chine. En même temps, elle porte le risque de heurter directement les intérêts américains sur le marché.

Lire : Executive Order on Addressing the Threat Posed by WeChat

En août 2019 (lire : Rivalités sino-américaines et risque de dislocation de la mondialisation « high-tech ». Le pire n’est jamais sûr, mais la menace se précise.) puis, six mois plus tard, en février 2020, QC avait déjà analysé le risque d’une dislocation du monde de la haute technologie. Lire : Risques imminents de fragmentation du paysage global des hautes technologies

En réalité, l’offensive directe déclenchée le 6 août par D. Trump contre deux fleurons chinois des réseaux sociaux ayant un accès libre au marché occidental où leurs actions sont perçues comme intrusives et potentiellement disruptives, alors que leurs homologues occidentaux sont fermement tenus en marge du marché chinois, ne fait qu’élargir une fracture déjà provoquée par le déséquilibre de plus en plus radical des systèmes politiques.

Ce n’est pas tout. Une stricte application des mesures pourrait forcer Apple à retirer WeChat et son homologue chinois Weixin de son offre d’applications qui deviendrait « infirme » en Chine. Un handicap qui, compte tenu du succès de WeChat, impacterait sérieusement le potentiel de la marque à la pomme sur le marché chinois.

La guerre de tranchées pourrait aussi conduire Washington à priver Tencent des microprocesseurs et logiciels américains, tandis que les groupes comme Walmart, Nike ou Coke qui utilisent WeChat pour activer leurs réseaux commerciaux et leurs campagnes publicitaires seront également touchés.

Tout indique que, négligeant les mises en garde sur la dislocation du paysage technologique, l’affaiblissement des standards et la difficulté de tenir réellement à distance les intrusions numériques chinoises, la Maison Blanche a décidé de riposter à la fermeture du marché chinois par sa propre « muraille coupe-feu » à laquelle Mike Pompeo a confié le soin de tenir à distance du Net américain ce qu’il nomme les « technologies chinoises sales. »

Ainsi pour le New-York Times, du 7 août, les restrictions imposées à WeChat et TikTok seraient les premières salves d’une riposte d’envergure contre les innombrables restrictions imposées par Pékin sur son marché du Net.

Guerre totale.

En imposant un embargo contre WeChat, le réseau à tout faire de la société chinoise que les usagers utilisent pour communiquer, faire leurs courses, échanger des photos et payer leurs factures, Trump menace directement la seule passerelle digitale autorisée par Pékin reliant la société chinoise à l’Occident où la diaspora et les étudiants retrouvent leurs familles et leurs amis restés au pays.

En même temps, l’offensive cible un réseau social sévèrement contrôlé par la police en Chine et qui, à l’étranger, est devenu le vecteur de la propagande du Parti.

Les nombreux détracteurs de Trump, soulignent que la manœuvre est risquée. Aux États-Unis les Huaqiao expatriés ont déjà exprimé leur crainte d’être coupés de leurs racines.

TikTok menace de porter plainte pour entrave à la liberté d’entreprise, tandis que la destruction des ponts de communication avec les Chinois handicapera l’épine dorsale de la nouvelle stratégie chinoise de la Maison Blanche qui, aux dires de Mike Pompeo lui-même, vise à développer les contacts avec le peuple chinois en contournant le Parti.

Pour autant, Trump persiste et signe, prenant même le risque d’une volatilité du marché. Alors que, depuis le décret du 6 août, les actions chinoises ont perdu 75,7 Mds de $ à la bourse de Hong Kong, l’administration cible les intérêts chinois à la bourse de New-York et au Nasdaq.

Depuis mai, un décret bipartisan fixe à 2022 la limite à laquelle les entreprises chinoises devaient s’être mises en conformité avec les standards de transparence des régulateurs américains sous peine d’être exclues des marchés.

Dernière cible en date : Carrie Lam.

Le 7 août le Département du Trésor américain annonçait des sanctions contre Carrie Lam et dix autres responsables de Hong Kong accusés d’avoir prêté main forte à Pékin pour la mise au pas de la R.A.S. de Honkong (voir la liste : Treasury Sanctions Individuals for Undermining Hong Kong’s Autonomy)

La gouverneure est accusée d’avoir été, par son insistance à instaurer une loi sur l’extradition à l’origine des émeutes de 2019, directement responsable du processus de normalisation politique de la R.A.S ayant abouti à la loi sur la sécurité nationale et à la suppression des libertés.

Les sanctions bloquent ses avoirs financiers et immobiliers aux États-Unis. A Hong Kong, elles frappent aussi les responsables du Département de justice, les chefs de la police anciens et actuels, ainsi que les représentant de Pékin dans la R.A.S. Elles interdisent aux personnes physiques et à toute organisation américaine de nouer des relations commerciales avec eux.

Les sanctions font suite à celles décidées le 1er août visant les entités et les personnes responsables du harcèlement des Ouïghour au Xinjiang au nom de la « Loi Magnitski » (2012) qui visait les fonctionnaires russes impliqués en 2009 dans le décès en prison de l’avocat Sergueï Magnitski, symbole de la lutte contre la corruption en Russie.

Sur la sellette, Sun Jinlong secrétaire du Parti des Bingtuan 兵团, le Corps en charge du développement et de la mise en valeur du Xinjiang, son adjoint Peng Jiarui et Chen Quanguo, l’actuel n°1 du parti dans la province, secrétaire général de la province, membre du Bureau politique, plus haut responsable politique chinois ciblé par les sanctions américaines, était le sujet d’un article de QC en janvier 2017. Lire : Au Xinjiang, Chen, le très efficace nouveau secrétaire général mêle répression et action sociale directe.

Fin 2018, QC proposait aussi une réflexion sur les tendances normatives du pouvoir politique chinois, à l’origine du quadrillage politique. Lire : Avis de raidissement politique au Ningxia. Réflexions sur les risques du totalitarisme idéologique.


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

A Hong-Kong, l’inflexible priorité à la sécurité nationale a remplacé la souplesse des « Deux systèmes. »

14e ANP : Une page se tourne

La stratégie chinoise de « sécurité globale » face aux réalités de la guerre

Que sera le « Dragon » ?

Brève et brutale crise boursière. Le prix de la défiance