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La Chine et la guerre du fer

Féodalités et ripostes chinoises.

Si les explications officielles n’ont pas réussi à convaincre, en revanche tout le monde a remarqué la pugnacité sur ce dossier du très actif président de l’association des armateurs Wei Jiafu.

Ce dernier se trouve être également le patron de COSCO, le géant chinois du transport maritime, en même temps qu’un membre éminent du Parti Communiste et de la Commission Centrale de discipline. En septembre 2012, il avait critiqué les « surcapacités » du transport maritime et violemment dénoncé « la vicieuse concurrence d’un nouvel arrivant du secteur », d’autant qu’en 2011, COSCO avait accusé 1,69 Mds de pertes.

Manifestement Wei, ulcéré qu’un ancien client et non des moindres, devienne son principal concurrent, a fait jouer ses relations et son influence dans le Parti pour freiner la stratégie de Vale en Chine et dans le monde, sans trop se préoccuper des incidences sur le prix du fer, pourtant crucial pour l’économie chinoise. Et la haute direction du Régime a pour l’instant emboîté le pas de cette controverse.

Mais il y a pire. Certains observateurs imaginent que la manœuvre chinoise, qui met Vale en grande difficulté, est une riposte aux pressions conjointes de BHP Billiton, Rio Tinto et Vale SA, et dont le comportement pour maintenir des prix du fer au plus haut est jugé arrogant. Déjà en 2010, la Chine et ses sidérurgistes avaient riposté contre l’attitude de Rio Tinto qui, après les avoir acceptées, avait rejeté les propositions de Chinalco de racheter 18% de son capital.

Le conflit s’était encore envenimé avec le refus des aciéristes chinois de céder aux exigences de prix des minéraliers, pourtant acceptés par le Japon et la Corée du Sud. La vengeance avait été très loin puisqu’une cour de Shanghai avait durement condamné pour corruption les employés de Rio Tinto en Chine, dont M. Hu Stern, d’origine chinoise, naturalisé australien.

Ce dernier, qui ne faisait que se soumettre aux pratiques habituelles du secteur dans la jungle de l’acier chinois, avait été condamné à 10 ans de réclusion et à une amende de 135 000 $ pour avoir accepté 900 000 $ de pots de vin de plusieurs sidérurgistes chinois et dérobé des secrets industriels, accusation qui n’a cependant jamais été prouvée par procès, dont cette partie a été conduite à huis clos. Ses trois collègues chinois avaient écopé de peines de prison allant de 7 à 14 ans, et de 980 000 $ d’amendes cumulées. Certains voient dans les manœuvres contre Vale, le deuxième acte des représailles chinoises contre le monopole des grands minéraliers.

Mais compte tenu des contraintes commerciales qui lient les protagonistes de cette guerre du fer – Vale exporte 40% de sa production en Chine (soit 120 millions de tonnes chaque année) et la Chine ne peut se passer du minerai brésilien, plus riche que l’Australien – il est probable qu’un accord sera trouvé, comme il l’avait été avec Rio Tinto, qui vend 25% de son minerai aux sidérurgistes chinois.

Peut-être s’agit-il des prémisses d’un armistice. Lors d’une visite au QG de Vale à Rio, en décembre dernier, le port de Zhanjiang près de Canton a signé un MOU avec le minéralier brésilien pour la construction d’un terminal de distribution de minerai de fer destiné aux petits aciéristes chinois. Il n’est pas anodin de signaler que le centre ainsi établi sera proche d’une aciérie en cours de construction par Baosteel, le n°1 chinois de l’acier.

Il reste maintenant à imaginer le meilleur discours, préservant la face de tous les protagonistes, qui permettrait d’enrober la volte-face des autorités chinoises autorisant à nouveau les minéraliers géants de Vale SA à accoster dans les ports chinois. Il y a fort à parier que le Brésilien, dont les affaires ont été secouées par cette escarmouche, acceptera quelques concessions sur les prix de son minerai.


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Par Caligula Le 25/02/2013 à 22h33

La Chine et la guerre du fer.

Bonjour,

La boulimie de matières premières de l’Empire du Milieu peut-elle s’accorder avec les besoins de l’Occident (j’entend par là les USA, l’UE). Quand on voit à quelles extrémités en sont arrivés ses pays pour s’approvisioner en minerais, et autres énergies fossiles, on peut (enfin, c’est le cas pour moi) se poser quelques questions sur l’issue de cette course aux matières premières et, par extension, aux profits.

Exemple : le gouvernement nord-américain est en train de ravager, au sens écologique, son territoire avec les gazs de chistes pour éviter une trop grande dépendance pétrolière.
La France a dit non à l’exploitation de cette ressource, mais par-là même augmente sa dépendance à l’importation de gaz. Le-dit gaz, vendu par la Russie et acheminé à l’aide du Northstream et, prochainement, du Southstream ; construit avec l’aide de la Chine.
Chine qui a investit en Algérie, dans la compagnie pétrolière Sonatrach, laquelle a fait de nouvelles découvertes de gisements. Et la Sonatrach est une des sociétés qui approvisionne l’Europe.

Au-dela de ça, la Chine a, depuis quelques années, massivement investit dans les pays émergents (sauf ceux situés sur son continent, il me semble) Amérique du Sud, et Afrique. Hors, il semblerait que ses vues sur le continent africain soient mal vues (zut, une répétition) par l’Occident. Et quand on connait la tactique mise en place par les USA et consors pour avoir accés à des matières premières...
Mais, et cela peut paraître ahurissant ; à ma connaissance la Chine n’a rien employé de plus agressif que son droit de véto à l’ONU (à propos de la Syrie).

Donc, question : le gouvernement chinois, serait-il prés, en cas de nécessité, à défendre ses intérets sur d’autres continents que le sien avec l’aide de l’APL ? Et, dans ce cas-là, il serait intéressant de voir la réaction de l’Occident.

Je vous remercie pour votre réponse à mon précédent post.

Salutations.

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