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Les habits neufs de la diplomatie chinoise

Une volonté d’apaisement.

En janvier 2012, alors que les Etats-Unis venaient de battre tambour, annonçant les bruits de ferraille de leur bascule stratégique vers le Pacifique et que les relations de la Chine étaient déjà tendues depuis plus de deux ans avec le Vietnam et les Philippines, Xi Jinping, alors vice-président, invité par Joe Biden, expliquait déjà « qu’il était impossible que la relation sino-américaine soit durablement perturbée », ajoutant que « le temps était venu pour un nouveau départ historique ». Il songeait évidemment à sa prise de fonctions 10 mois plus tard.

Le ton était le même, tout récemment, le 19 mars à Pékin, lors de la rencontre du Président, avec le nouveau secrétaire d’état au trésor Jacob Lew. Au milieu des controverses sur le droit de propriété et les cyber-attaques chinoises, qui n’ont donné lieu à aucun commentaire public, Xi Jinping a répété que les différends pourraient être réduits par une meilleure coopération à condition de les mettre en perspective par une « vision stratégique du long terme. ». Il ajoutait qu’en dépit des divergences stratégiques et commerciales importantes - plus de 300 Mds de $ de déficit commercial américain en 2012 -, il existait également de considérables intérêts convergents, ferments d’une relation bilatérale au bénéfice des deux peuples.

Peu de temps avant la rencontre avec Joe Biden, Xi Jinping s’était rendu en décembre 2011 au Vietnam, alors que les relations entre Pékin et Hanoi étaient en pleine effervescence, ponctuées par des manœuvres militaires entre la marine vietnamienne et l’US Navy – une évolution que Pékin jugeait très néfaste -, pour y entériner un accord entre les deux pays conclu 2 mois plus tôt sur la délimitation des eaux territoriales et l’exploration conjointe des parages des îles Paracel.

Pris au pied de la lettre, l’accord, discret, mais dont les termes sont étonnamment conciliants, stipulait que, au moins dans cette zone, la Chine pourrait transiger sur les principes qui fondent ses extravagantes revendications territoriales en Mer de Chine du Sud.

La déclaration précisait en effet que « les deux pays rechercheraient des solutions durables, acceptables par les deux parties sur la base de la Convention des NU sur le droit de la mer ». En attendant un accord global sur la question de souveraineté, Pékin et Hanoi négocieraient activement une coopération pour un développement conjoint des ressources.

La volonté de réduire les tensions et les risques d’accrochage intempestif en Mer de Chine est également apparue, lors de la 12e ANP en mars 2013, au travers du regroupement, sous une même autorité, des quatre flottilles paramilitaires - surveillance maritime, garde-côtes, assistance aux pêches et douanes - dont la présence intensive, parfois désordonnée autour des zones contestées porte d’importants risques de dérapage, récemment soulignés par un rapport de l’International Crisis Group publié l’été 2012. (page 20).

En Asie du Nord-Est, alors que les tensions stratégiques continuent à faire la une des médias, avec notamment l’agacement chinois de l’accélération du dispositif antimissile américain, le nouveau gouvernement à Pékin déclarait récemment qu’en 2013 trois séries de négociations auraient lieu sur le projet d’une zone de libre échange avec Séoul et Tokyo, d’abord à Séoul les 26 et 28 mars, puis à Pékin et à Tokyo pour les 2e et 3e phases. S’il est vrai que l’empressement chinois résulte aussi de la volonté de faire contrepoids à l’initiative américaine du « Partenariat Trans-Pacifique – PTP », le processus pourrait néanmoins aboutir à l’allègement des tensions avec le Japon. En même temps, il paverait la route à un compromis sino-américain, dans un contexte où beaucoup d’experts considèrent que la mise à l’écart de la Chine du PTP par la Maison Blanche serait irréaliste.

Enfin, le 21 mars, un article du Quotidien du Peuple rendait compte d’une conversation téléphonique entre Xi Jinping et la nouvelle présidente de la Corée du Sud Park Geun-hye, dont la teneur indiquait un glissement de la position chinoise. Alors que, depuis plusieurs années celle-ci était en effet ancrée aux côtés de Pyongyang, au point qu’en 2010, lors des agressions militaires contre Séoul, Pékin avait refusé de condamner la Corée du Nord à l’ONU, le nouveau président chinois s’est redonné une marge de manœuvre en se replaçant dans le rôle plus neutre de médiateur.

Il a en effet encouragé le dialogue direct entre le nord et le sud – pour l’heure rejeté par Pyongyang - et réaffirmé l’intérêt du peuple chinois pour la dénucléarisation de la péninsule, une priorité rappelée par l’Ecole Centrale du Parti, alors que jusqu’à récemment tout indiquait que le souci majeur de Pékin était avant tout la stabilité de la péninsule au point que l’élimination de l’arme atomique pouvait apparaître à beaucoup d’experts de la question nord-coréenne comme une annexe aléatoire des priorités chinoises.

Alors que nombre d’observateurs estiment que la 3e explosion nucléaire a changé la donne, Huang Youfu, professeur et expert d’études coréennes à l’université des minorités de Pékin, considère que l’évocation par Xi Jinping de négociations directes entre Séoul et Pyongyang « est une incidence rare ». Elle l’est en effet si on considère le parti pris pro Pyonyang de Pékin ces dernières années et le fait que la conversation, rapportée par Xinhua et les principaux journaux chinois, a accordé autant d’importance à l’exigence de la dénucléarisation qu’à celle de la stabilité.

Adepte de l’apaisement diplomatique Xi Jinping ne sera pas non plus un boutefeu militaire, influencé par l’APL, dont les capacités s’améliorent vite, mais dont les lacunes sont, selon les responsables militaires chinois eux-mêmes, encore nombreuses.


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