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›› Editorial

Vue cavalière de l’année du Cochon. Perspectives du Rat

Économie. Entre réformes et relance, l’hypothèque virale de Wuhan.

En économie, le paysage de 2019 a été dominé par la guerre commerciale avec Washington, le souci de lutter contre la finance grise, l’ambition d’assainir le marché financier et de l’ouvrir de manière contrôlée. En arrière-plan on perçoit la constante hésitation entre la volonté de contrôler la dette contre la tentation de relance budgétaire pour soutenir une croissance en recul que les dernières statistiques situent à +6% au 4e trimestre 2019.

L’intention de relance s’est exprimée d’abord par les réductions successives des ratios des réserves obligatoires des banques dont la plus récente date du 6 janvier 2020. 8e réduction depuis le début de 2018, elle a cette fois libéré 115 Mds de $. L’autre mesure de relance est la baisse des taux d’intérêts dont la dernière a été ordonnée par la Banque de Chine le 20 novembre 2019. La mesure vise à diriger les investissements vers l’économie réelle, plutôt que vers des placements financiers.

Elle faisait suite à la décision prise en août de relier le système d’établissement de taux prêteur de référence au marché déterminé par la demande réelle de liquidités à la banque centrale par 18 institutions financières dont 2 étrangères. Avec un taux de référence ajusté chaque mois, la mesure qui fait pression sur la rentabilité des banques, visait à baisser le coût des emprunts et à réduire les charges de financement pour les PME et le secteur privé.

Bien que le pouvoir se défende de pratiquer une politique systématique de soutien financier à l’économie, la plupart des économistes anticipent que la banque de Chine renouvellera ses baisses de taux d’intérêt en 2020. Les mesures de 2019 ont été accompagnées par un relâchement du contrôle du taux du Yuan qui, début août 2019, a, pour première fois depuis 2008, repassé à la baisse le seuil des 7 Yuan pour 1 $.

Cette dernière décision s’inscrit dans les mesures de ripostes chinoises à la guerre commerciale déclarée par la Maison Blanche. Son premier effet est de soutenir les exportations. Il est cependant peu probable que Pékin aille beaucoup plus loin en 2020. Il est probable que le Yuan se stabilisera au taux de 7 pour 1 $.

L’assainissement des finances publiques a franchi une nouvelle étape en 2019 par l’intervention des régulateurs dans le marché interbancaire, principal refuge de la finance grise.

L’incursion publique dans ce terreau des financements suspects, au risque de mettre les établissements financiers les plus fragiles en difficulté, prouve la sincérité de la démarche de nettoyage. Prenant ses responsabilités, l’État a placé sous sa coupe la Banque Baoshang, premier défaut interbancaire en Chine. A marquer d’une pierre blanche.

L’année s’est achevée par l’embellie de l’armistice commercial entre la Chine et les États-Unis dont la signature a eu lieu à Washington le 15 janvier. Lire : Chine – États-Unis. Mise en scène d’un armistice commercial. Le diable est dans les détails.

Même si toutes les taxes n’ont pas été supprimées l’accord a réduit les incertitudes et stoppé la baisse de la croissance à +6%. Au 4e trimestre le secteur des services a progressé de 6,9% ; la croissance de la production était en hausse légère à +5,7 %, celle de la production industrielle, plus vigoureuse à +5,9% . Quant à la croissance de la consommation, elle était à +8%.

Sévères secousses à venir.

Dans l’immédiat, cependant, alors que les problèmes structurels restent entiers (lire : L’ANP 2019. Un empilement de défis économiques et politiques.), la crise médicale de Wuhan qui frappe la Chine après la catastrophe de la grippe porcine, constitue une carte sauvage ayant réduit à néant l’espoir d’une éclaircie. Ses effets sur l’économie aujourd’hui en partie à l’arrêt sont difficiles à estimer, d’autant qu’ils dépendent de la durée de l’épidémie.

La mise en quarantaine a en partie décimé le secteur du tourisme. Les principales agences de voyage, les hôtels et les compagnies aériennes ont offert des remboursements pour février. Certaines compagnies aériennes ont suspendu leurs services à destination et en provenance de Chine.

Les étrangers sont touchés. Tesla a temporairement fermé sa nouvelle usine de Shanghai. Apple a perdu la production des sous-traitants de Wuhan. Les Français de Wuhan pour ne citer que ceux-là (PSA, Renault, Valeo, Plastic Omnium, Delfingen, Suez, Saint-Gobain, Sanofi, Accor, LVMH) seraient gravement impactés si la crise se prolongeait.

L’Académie des Sciences sociales prédit une baisse de 5% de croissance au premier trimestre et une perte totale de plus de 60 Mds de $. A l’ouverture des marchés de Hong Kong, le 27 janvier l’indice Hang Seng (HSI) a plongé de près de 6%. La plus grande crainte de la direction chinoises est celle d’une crise de liquidités.

Pékin et les provinces ont commencé à réagir. 12,6 milliards de dollars ont été alloués aux dépenses médicales (recherche, traitements et équipements). Les grandes banques ont baissé les taux d’intérêt pour les PME et les particuliers dans les zones les plus touchées. La Banque de Chine autorise les habitants du Hubei à retarder leurs remboursements de prêts de plusieurs mois s’ils perdaient leur source de revenus.

Occupé à riposter à la Crise, Pékin dont la demande intérieure se contracte déjà, aura du mal à tenir sa promesse de l’armistice commercial d’acheter 200 Mds de $ de produits américains au cours des deux prochaines années.

Les 200 millions de migrants sont parmi les plus exposés à la crise. Beaucoup d’entre eux qui se déplacent des zones rurales vers les villes pourraient de ne pas trouver d’emploi. Quant aux 10 millions de travailleurs migrants du Hubei, il est facile d’imaginer que, dans la psychose ambiante de la peur de la contagion, ils seront victimes de discriminations.


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